SCÈNE X.

LA ROSERAIE, MADAME DE VITRÉ, CAROLINE.

MADAME DE VITRÉ.

Mais pourquoi donc? (Haut, à Caroline.). Eh bien, mon enfant, vous voyez que notre épreuve a réussi... et j'espère que vous ne douterez plus de sa tendresse... (Elle lui prend la main, comme pour la conduire à son mari.)

CAROLINE.

Je vous comprends, madame... je vous remercie... Mais pour être bien assurée de cette précieuse tendresse... pour en être heureuse sans remords, il faudrait la mériter... et non la surprendre...

LA ROSERAIE.

C'est donc vrai?

CAROLINE.

Cet aveu, je le sais, monsieur, peut nous séparer à jamais ; mais s'il pouvait nous réunir, ah! ce serait aussi à jamais... Oui... dans une heure de doute et de découragement, j'ai écouté, avec trop de patience, un langage qui vous offensait. La main qui a écrit ce billet a pu un jour... un instant... toucher la mienne... J'en ai rougi ; mais je l'ai souffert.

MADAME DE VITRÉ.

Bien, bien, mon enfant! courage !

CAROLINE.

Voilà ma faute, toute ma faute, je vous l'atteste ! Elle est grande, je le sais ; mais je vous atteste aussi devant Dieu que jamais l'ombre même d'une telle faiblesse ne se fût mise entre nous, si vous m'aviez fait entendre jamais une de ces douces paroles que je recueillais tout à l'heure de votre bouche avec ravissement!... Vous allez prononcer sur mon sort, monsieur ; mais ces douces paroles en ont déjà décidé. (Très-émue.)Condamnée ou pardonnée, je passerai ma vie désormais à chérir ou à regretter amèrement le cœur que j'ai méconnu... que je connais trop maintenant, si je dois le perdre. - Est-ce donc fini tout à fait... dites?

LA ROSERAIE, lui prenant la main.

Je vous crois. (Il la serre sur son cœur.)